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Baba the Turk, a Bearded Lady

« Chère Christine,
Est-ce que la même personne que j’ai vu en rehearsal?
Quelle présence
Quelle force
You said you don’t find yourself very funny in that scene.
Apparently the audience does not agree
Pat »

Voilà le précieux compliment (retrouvé dans mes archives) que je recevais au lendemain de la présentation de The Rake’s Progress, d’Igor Stravinsky, lors du stage que j’effectuais au Banff Centre of Fine Arts, il y a de cela quelques décennies…

Sur deux distributions, il se trouve que j’avais été choisie parce que j’avais apparemment été la seule mezzo au Canada à avoir auditionné avec l’aria!!! Franchement, même avec le peu d’expérience que j’avais, il ne me serait jamais venu à l’idée de présenter autre chose. Un air très difficile, certes, mais ceux qui me connaissent savent que les difficultés musicales ne m’ont jamais fait peur. J’avais préparé cette audition avec la coach Marie-Thérèse Paquin, qui n’en laissait pas passer.

Expérience formidable, celle-ci dirigée par le réputé metteur en scène Brian MacDonald et du chef d’orchestre Raffi Armenian. J’avais pour camarades québécois Marie-Danielle Parent (Anne Trulove), Jean-Clément Bergeron (Nick Shadow) et Monique Martin, pianiste répétitrice.

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Moi, c’est Renée que j’aime le mieux !

Octobre 1987. C’était à Paris, au Centre culturel canadien. Toutes les deux étions affairées à la préparation de nos récitals respectifs dans la petite salle du Centre.

J’ai eu la maladresse, ou plutôt l’indélicatesse de la « bousculer », étant probablement pressée par tout ce que je souhaitais accomplir pendant ce court séjour au Studio du Québec — j’étais la première récipiendaire à n’avoir que six mois… N’empêche. J’en ai conservé du remords.

Janvier-février 1994, la voilà dans la salle où je m’expose comme comédienne-chanteuse dans la production de Le roi se meurt de Ionesco. J’y tenais le rôle de la servante Juliette et j’avais la direction musicale du spectacle. On ne pouvait me manquer : en plus de mon rôle, je chantais du Mahler, du Hugo Wolf et d’autres pièces mettant en voix toute la distribution.
À la fin du spectacle, je me suis précipitée dans le hall du théâtre La Veillée, aujourd’hui Propero. Elle était toujours là. Je n’avais qu’une hâte : m’excuser !
Mais surtout en profiter pour la féliciter : sa voix était plus belle que jamais et j’avais tant apprécié la délicatesse de son chant dans l’opéra Nelligan.

À peu près cinq ans jour pour jour (printemps 2014), je lui demandais d’être la marraine de la création de mon « Opéra-Chansons » WXYZ… Code secret. Robert Langevin, son conjoint, m’apprend alors que Renée était désormais trop malade pour accepter quelque responsabilité de nature culturelle et publique, sans toutefois que je sache de quoi elle souffre.

Son état déclinant était connu dans le milieu mais ce n’est que tout récemment que la nouvelle a sorti. Une initiative d’hommage, certes de bonne foi, l’étouffe, plus que ne la mette véritablement en lumière. L’enterre avant l’heure…

C’est ELLE que je veux entendre ! L’original est de LOIN supérieur à toutes ces chanteuses qui ne lui vont pas à la cheville comparé à son intelligence créatrice et la qualité de sa voix. Elle a eu la sagesse d’en prendre soin mieux que personne pour la mettre au service de ces créatrice (Clémence) et créateurs (Brassens et Ferré) qu’elle a su honorer avec tant de grâce, là où était sa véritable « maison » artistique.
Aucune d’elles n’a jamais su apporter autant de nuance, de simplicité et de caractère tout à la fois dans leur chant et leur interprétation. Le raffinement est devenu une denrée rare…
L’ayant « connue » avant l’ère Venne, le chemin parcouru est impressionnant.

Moi, c’est « Renée que j’aime le mieux* » !

*en référence à Moi, c’est Clémence que j’aime le mieux