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Histoire de chevelure…

J’avais vingt ans… ou presque. J’avais une très belle crinière, mais à cette époque, il fallait absolument que les cheveux soient lisses, droits comme une épingle… Comme je n’arrivais pas à les dompter, encore moins les coiffer — sinon j’avais l’air deux fois mon âge pour satisfaire la galerie, je n’en pouvais plus des rouleaux jumbo, des produits chimiques et surtout de passer mes samedis devant le miroir à blasphémer! Comme j’étais complexée!!!

Ainsi, en secret, en visite chez mes parents à Beauport, et, par la même occasion, y inviter mes nouvelles amies de Montréal, j’ai profité du Carnaval de Québec de 1975 pour faire le grand saut : la coupe afro! (plus affreuse qu’autre chose au premier abord…) Quelle surprise!!
À partir de ce moment historique (absolument!), ce fut désormais le laver-porter. Basta! Ter-mi-né! Pour toujours!

Quelle fut la réaction de ma nouvelle professeure de chant? « C’est pas une tête de chanteuse classique, ça! » À quoi je lui répondis : « C’est bien en quoi! »
Je n’en avais rien à cirer d’avoir la « tête de l’emploi », moi. Je voulais être bien avec moi-même, et avec ces cheveux-LÀ. Je ne voulais plus avoir à tester les angles pour cacher mon (je croyais) vilain nez! Il se camouflait tout seul maintenant. Et, Dieu soit loué, j’ai résisté à la chirurgie, n’en ayant pas les moyens. Je me suis épargnée le résultat, parfois discutable…

Ce n’est donc pas pour rien que, quelques années plus tard — et pas que pour ma tête, on me faisait peut-être le plus beau compliment de ma « carrière » : « Vous rajeunissez l’image qu’on s’était toujours faite des chanteuses d’opéra. » — Jeanne Quintal (comédienne, professeure au Conservatoire d’art dramatique de Québec), Québec en chansons 1981.

Pour la petite histoire, Guy-Jean Beaulieu était mon grand ami, et ce, depuis l’École de musique de l’Université Laval. Il avait de nombreux talents (hélas, je n’ai plus de contact avec lui depuis de nombreuses années et j’ignore ce qu’il est devenu). En plus de faire de la photo et me prendre pour modèle, il me confectionnait des vêtements tout à fait originaux. Disons que j’avais du style, beaucoup grâce à lui…

Cela aura pris de nombreuses années pour me faire une tête au point qu’elle devienne, sans calcul aucun, je le jure!, une « marque de commerce ».
Et plus mes cheveux était libres, plus j’avais l’air jeune…

Je n’avais pas l’intention de faire l’étalage exhaustif de l’évolution de ma chevelure. Même si cette histoire est loin d’être terminée, je conclurai ici. Parce que, malgré qu’elle soit désormais blanche et toujours bouclée, ce à quoi je tiens mordicus — témoins les photos concernant mon album de chansons et le spectacle qui s’ensuivit, je demeure aux prises avec « C’est pas une tête de… », et ce, dans d’autres sphères professionnelles (avec le prix à payer!)…

Comme quoi le conformisme, en ce qui a trait à l’image des femmes, à plus forte raison du moment qu’elles prennent de l’âge, demeure préoccupant — rares sont les exceptions. D’autant plus quand je vois de jolies jeunes femmes se pliant, cédant au dictat voulant qu’un cheveu, même 40 ans plus tard (!), devrait encore et toujours être lisse, dompté, jusqu’à arborer la perruque dans certains cas…
Misère!
Vive les (vielles) insoumises!

PS : Depuis cette publication, je tombe sur d’autres copies de la première série où il est écrit à l’endos : « Fin’70/Début’80… Point de repère : la bague achetée avec G.S. en Arizona, à l’été 1978 »!
Avec le temps, j’avais fini par oublier quelque peu cette vieille histoire d’amour…
Ce qui est conté plus haut est toujours aussi vrai, faut croire que mes cheveux auraient poussé très vite en trois ans…
Non seulement cette histoire est vraie, mais aujourd’hui (18 mai), en poursuivant la numérisation de mes photos professionnelles, je tombe sur un post-it où je paraphrase la chanson d’Aznavour (qui ouvre cet article) avec ceci (non daté mais ça fait un bail!) :
Hier encore, j’avais vingt ans / Et je passais mon temps / À m’défriser les ch’veux / 
Et tant, tant blasphémé / Jusqu’à me damner / Pour l’éternité / Pas b’soin d’vous les citer
– sur l’air de « Ma jeunesse »
Comme quoi…

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C’était il y a 40 ans…

23 mai 1980 :
Récital de fin de maîtrise en Interprétation-chant, Université de Montréal.

Événement des plus importants et significatifs pour tout aspirant à la profession musicale classique.

Cela fait plus d’un an que je numérise, à temps perdu, mes archives scolaires et professionnelles audio sur bobines et sur cassettes. Une entreprise immensément délicate et hasardeuse, faite d’essais-erreurs, compte tenu du temps passé et des conditions d’entreposage.

Honnêtement et humblement, je n’en reviens pas de la qualité vocale et d’interprétation qui fut mienne. Une voix limitée dans les aigus, certes, mais une voix juste et une interprétation remplie d’esprit et de dynamisme ainsi qu’une rigueur musicale incontestable.

Comme je n’avais jamais ré-entendu tout ça jusqu’à maintenant, je n’arrive toujours pas à comprendre l’entêtement de mon professeur d’alors d’avoir tout fait pour m’empêcher de poursuivre dans mes ambitions musicales, et ce, par des intrigues indignes d’une personne de son statut. S’étant mythifiée de son vivant, elle était passée maître dans la démolition sans borne et injuste des prétendants qui ne rencontraient pas ses critères esthétiques.

Le rôle d’un professeur n’est-il pas de développer l’estime et la confiance en soi d’un élève qui nous a choisi? Encore faut-il l’aimer…
Pour seul compliment pendant toutes ces années : « Tu es le modèle parfait de la persévérance »…

J’aurai passé le reste de mon existence — avec force rage et insomnies — en quête de ma vraie voix et de ma vraie voie, et récupérer un semblant d’estime et de confiance en moi ainsi qu’en mon talent, celui-ci pourtant reconnu.

De cette maîtrise, je disais à qui voulait l’entendre qu’on me l’avait accordée par charité, tellement j’étais devenue complexée parce que comparée à tout le monde. Or, à force d’écouter l’enregistrement de ce récital, force est d’admettre que Gaston Germain, membre du jury, avait raison de me l’accorder. Et, l’ayant adopté plus tard pendant quelque temps comme professeur, il n’avait cesse de me dire que j’avais une belle voix, moi, n’arrivant toujours pas à le croire, malgré mes succès… J’avais encore des croûtes à manger pour soigner cette voix (et l’âme!!!) si mal dirigée depuis mon adolescence.

Je n’ai pas tout résolu mais c’est grâce à lui que j’ai réussi à comprendre des choses simples et fondamentales, particulièrement en me dirigeant vers un professeur éminent et reconnu, Vera Róza, à Londres, en 1989.

Ma combativité, la passion de la découverte et du faire-autrement-que-tout-le-monde qui m’animaient m’ont amenées vers une créativité dont je ne suis pas peu fière. Pour aboutir enfin à l’inattendu : la création de cet « Opéra-Chansons » qui fut créé presqu’à la même date, il y a maintenant 6 ans, en tant que auteure-compositrice-interprète, réalisatrice, conceptrice, etc.

ProgrammeFinMaîtrise1980

Voici le programme dont je suis très fière. Particulièrement où la création de l’oeuvre de Claude Frenette, sur des poèmes de Nicole Desrosiers, Les Oiseaux de Verre, fut un précédent pour un récital de maîtrise. Précédent qui semble n’avoir jamais été reconduit — je n’ai pas fait mon enquête. Cette commande, une histoire qui mériterait un article à elle toute seule…

Comme le résultat de la numérisation n’est toujours pas disponible, je vous fais entendre ici la version selon l’instrumentation prévue (harpe au lieu du piano) de l’oeuvre de mon ami Claude Frenette, alors élève d’André Prévost, au baccalauréat, laquelle eut droit à un enregistrement pour l’émission Alternances et qui fut gravée peu après sur étiquette RCI-570. Le numéro 7 est véritablement la 3e pièce du cycle.

Mais encore : si ce retour dans la passé puisse me permettre la poursuite d’une reconstruction qui reste encore à finir, si jamais il est possible d’y arriver enfin…

Merci d’avoir lu jusqu’ici et bonne écoute.

La laideur ?

Vous connaissez Juliette Nourredine ? S’il est un laideron de la scène musicale féminine, c’est bien elle.
Or, je l’a-doooooo-re ! Il s’agit d’une artiste de la chanson française d’immense valeur. Un talent fou ! Dotée d’un sens de l’humour truculent et d’autodérision rafraîchissante, celle-ci se fout de ce qu’on peut bien penser ou dire d’elle.

L’ayant vue en spectacle lors du Coup de cœur francophone en 1993, en plus d’un répertoire à faire rougir n’importe qui, j’ai été témoin d’une bête de scène, assurée et remplie de son art. Depuis, je suis une inconditionnelle.

Nous sommes témoins de propos fort disgracieux concernant la Révélation de l’année Safia Nolin (qui m’a conquise récemment). Depuis son très jeune âge, cette jeune femme a fait l’objet de malveillance — le mot est faible. De quoi être complexée pour la vie…

Je serais bien étonnée qu’elle aie voulu ressembler à Juliette Nourredine, qui pourrait bien lui servir de modèle.

Quoiqu’il en soit, déterminée, dimanche soir Safia Nolin a posé un geste d’affirmation. Un « statement ». C’est tout en son honneur. Et dans le fond, un pied de nez à tous les vilains de ce monde, leur criant sans doute : « Mangez…, f… y… !, MOI, j’ai un FÉLIX ! »

Je lui dis bravo et bonne chance. Mais surtout, prudence : une artiste (surtout une fille) a beau avoir un talent immense, être d’une beauté de fée, si elle est mal entourée…

Gare aux vautours…*

sn

Safia Nolin

*Les Vautours, titre #11, WXYZ… Code secret, un « Opéra-Chansons »