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Nom du cd de mélodies françaises

Éva Gauthier, c’était il y a vingt ans!

Le 30 octobre 2000, avait lieu la seule et unique représentation de mon spectacle Éva Gauthier, Pionnière du Chant Moderne en Amérique… ou La « Javanaise », dans le cadre du Festival SuperMicMac consacré aux musiciennes pionnières canadiennes.

Mais qui est donc Éva Gauthier? Brièvement : en plus d’avoir été la protégée d’Emma Albani, célèbre soprano canadienne, Éva, née à Ottawa, fut celle qui fit découvrir George Gershwin au monde entier. Rien de moins! Avant-gardiste et précurseure du « World Music » avant la lettre, elle fut la figure de proue de la vie musicale américaine des années 1920-30, au point d’avoir été consacrée The High Priestess of Modern Song (les liens ci-haut vous en diront plus long).

À la fin des années 1980, j’avais commencé à tâter le terrain pour faire de mes récitals de mélodies un événement théâtral, ne faisant absolument jamais appel aux airs d’opéra. Audace qui pouvait être jugée d’hérésie, mais qui, rapidement, fut chaudement saluée par tous ceux et celles qui furent témoins de ce « work in progress » sur le thème des animaux. Il aboutit d’abord à un album cd d’oeuvres alors inédites, BESTIAIRE (Sne 565), puis de La Belle… et les bêtes, un zoopéra.

Feu Gaston Germain, qui connaissait mon penchant et qui avait été sur le jury lors de la défense de thèse de doctorat de Nadia Turbide* sur ce personnage hors du commun, considérait que j’étais LA personne qui pouvait lui rendre un tant soit peu justice et de façon originale. Avec la permission et la précieuse complicité de l’auteure, j’ai pu obtenir une bourse en Recherche et développement du ministère de la Culture du Québec. Ce qui m’amena à la New York Public Library où se trouve entre autres son fonds de partitions, ainsi qu’aux Archives nationales du Canada, à Ottawa, où l’on trouve les documents sonores et autres artéfacts. Et ultimement, faire un court stage en « javanisation » à l’American Gamelan Institute, NH.

La thèse m’annonçait déjà des découvertes extraordinaires. Mes visites à plus forte raison! À revoir mes archives pour écrire cet article, je revis toute l’excitation que j’avais éprouvée pour le sujet dans l’élaboration de ce programme.
Nous étions en 1993… J’avais envisagé un projet très ambitieux, genre pièce de théâtre imbriquant de nombreuses pièces musicales. J’aurais été le personnage principal, avec un acteur masculin pour représenter entre autres Gershwin et son fils.
Pour ce faire, j’avais réussi à obtenir un parrainage d’aide à l’écriture de l’UNEQ. J’ai dû rapidement remercier l’auteure désignée, aujourd’hui décédée : elle avait balayé du revers de la main tout le plan que j’avais longuement et sérieusement élaboré pour m’imposer ses vues paranormales et ésotériques…

Un travail de longue haleine étalé sur près de dix ans (une norme dans mon cas!), les années passent et les sous ne sont pas au rendez-vous pour y aller de mon propre chef ou même sous la bannière des Productions « La Fille de l’Île », obnl que j’avais dû fonder en 1994… Apprenant l’existence du festival organisé par SuperMusique, Danielle Palardy Roger fut très intéressée par ma proposition, laquelle fut peut-être un compromis à mes idées premières. Mais encore, cela me préserva de me donner tant d’importance, l’héroïne et la musique auront avantageusement pris la place qu’elles méritent. 

J’avais à peine huit mois pour me préparer pour le grand jour, sans subvention gouvernementale ni revenu personnel; une telle production demande de s’y consacrer à plein temps et pendant au moins une bonne année. Non seulement sans le sou, j’ai dû emprunter pour me procurer divers objets scéniques, la location d’un local de répétitions, la confection de mon costume, etc. J’ai dû également renoncer à l’embauche d’un metteur en scène, un simple récital n’était tout simplement pas envisageable. Vu mes expériences antérieures, on m’a encouragée à plonger dans l’aventure. J’ai même composé un rap pour la circonstance : Le Rap du  » Name-Dropping »!

Expérience des plus concluantes et très bien reçue par le public, mais qui, selon moi, demandait encore quelques ajustements pour une reprise éventuelle. Non pas dans le contenu ni le propos, mais dans certaines directions de mise en scène justement, le temps ayant douloureusement manqué.

Alors, pourquoi donc « seule et unique représentation »?
Un projet mort-né, saboté, pourra-t-on affirmer. Raisons arbitraires, fâcheuses et injustes — également celui de produire un disque avec un programme aussi original a avorté –, qui feront l’objet d’une suite à ce billet, un article trop long pouvant ennuyer le lecteur…
Je ne suis pas seule à avoir pâti de cette histoire : Réjean Coallier, mon pianiste, a tout autant contribué à la qualité indéniable pour l’aboutissement de ce projet, sans compter les heures innombrables qu’il y a mises. Je luis dois un fier grand merci!

Et personne va m’enlever la fierté d’un tel accomplissement.

Pour consultation du programme intégral, suivre ce lien.
Pour plus de photos, suivre ce lien.

Pour plus d’informations sur Le Rap du « Name-Dropping », suivre ce lien.
Pour lire la suite 1/2 de cet article, suivre ce lien.

Pour lire la deuxième et dernière partie de l’article, suivre ce lien.
Pour lire sur l’oeuvre de Charles T. Griffes, Three Japanese Songs, et l’entendre, suivre ce lien.

À suivre…

*Turbide, Nadia. Biographical Study of Eva Gauthier, Université de Montréal, 1986.

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Public cible? Foutaise!

Oh que oui!
Combien de fois m’a-ton demandé à qui je m’adresse, combien de formations prises pour trouver mon fameux « public cible »!
Question à laquelle je n’ai jamais été capable de répondre parce que choisir une prétendue élite, c’est mépriser quiconque aurait été en mesure d’apprécier ce que je proposais. Mon but était de faire découvrir à tous ce que moi-même je découvrais. Non pas connaissais, mais bien découvrais, parce que je partais d’aussi loin qu’eux, sinon davantage. Et surtout le présenter d’une façon plus moderne.
L’enjeu est désormais de nature marketing et non artistique….

Pour corroborer ceci, je partage ici un extrait de Téléjeans où Yvon Deschamps était interviewé par deux adolescentes :

Est-ce que tu essaies de rejoindre un certain public dans tes spectacles? Est-ce que tu t’adresses à un public en particulier? Est-ce que tu prépares tes monologues en vue de…
— Non, jamais.
— …une certaine catégorie de gens?
— Non. On peut pas penser à ça parce que tout ce que tu peux faire, c’est parler. Tu peux pas décider de qui va t’écouter. Tu peux pas écrire pour quelqu’un, tu peux pas écrire pour un public ou pour des gens. T’écris pour toi. T’écris ce que t’as de plus vrai, de plus profond, de plus… […] J’ai envie de parler d’affaires qui m’achalent dans la vie, j’ai envie de parler de mes angoisses, surtout, j’ai envie de parler de mes problèmes, et puis en me disant que peut-être qu’il y a du monde qui se reconnaissent parce qu’ils ont les mêmes problèmes que moi.
Yvon Deschamps, Téléjeans, 10 février 1979

Yvon Deschamps, de l’humour? Non. Du grand art, véritable.

Un « zoopéra », pourquoi devait-il être un spectacle exclusivement pour enfants? Ma foi, c’est pas parce que je chantais, dans La Belle… et les bêtes, un « zoopéra »des Fables de Lafontaine, entre autres, cela ne devait être appréciable que par des enfants. Lafontaine  disait lui-même que son oeuvre était destinée aux adultes. Trafiquer ce spectacle, dont on a dit énormément de bien, juste pour faire de l’argent? Que non! En aurais-je vraiment fait? Pourtant, les enfants étaient les bienvenus. Beaucoup d’entre eux auraient compris, eux aussi, toute la magie et l’humour qu’on pouvait y trouver.

J’ai mis un an de préparation, sans aucun revenu, pour présenter, en octobre 2000Èva Gauthier, Pionnière du Chant Moderne en Amérique ou… la « Javanaise », un seul soir. Pour me faire dire par l’agente du ministère de la Culture de l’époque, à qui je demandais une subvention pour développer plus avant ce projet, que ça ne rejoindrait aucun public (je résume grossièrement)! Pourquoi alors ce même ministère m’aurait-il octroyé quelques années plus tôt une bourse de recherches, d’aide à la création, laquelle m’aura amenée à New York et Ottawa, y trouver des perles incroyables, s’il était pour n’y avoir aucun débouché?! Le public a véritablement apprécié ce projet, fort embryonnaire pourtant. Un avenir saboté par l’hôte, mais ça, c’est une autre histoire…

Et plus récemment, L’« Opéra-Chansons » WXYZ… Code secret, qui m’a été refusé par des diffuseurs (eux, ils connaissent leur public!) parce qu’on ne sait pas dans quelle case le programmer — c’est trop chanson, c’est trop classique, et quoi encore! J’ai publié sur cette plateforme à l’issue de la création les commentaires des plus élogieux concernant la valeur de cette oeuvre.
Celle-ci parle de condition d’artiste, de femme artiste, de femme tout court. Aurait-il fallu que je m’adresse exclusivement aux intéressées? N’est-ce pas un peu réducteur?
Et les hommes, pourquoi n’auraient-ils pas accès à ce qu’ont à dire les femmes de leurs conditions toujours aussi précaires? Pourquoi ne devraient-ils pas s’y intéresser, à plus forte raison par les temps qui courent…
Vous remarquerez que les commentaires les plus profonds proviennent de la gente masculine…

Certes, il y a « des » publics. Mais ignorer certains au profit d’autres n’est pas honnête. L’art, ce n’est pas ça. Le public choisit, certes. Mais si on persiste à le garder dans l’ignorance, pour des raisons bassement mercantiles?

Je peux bien être pauvre…

Mon (unique) souvenir de Claude Gingras

Juillet 2001. Concert d’ouverture du Festival de musique de chambre d’Oka. « Patrimoine en musique », des oeuvres pour ensemble vocal. Le tout était dirigé par Agnès Großman mais préparé par Jean-Pierre Guindon, qui était alors maître de chapelle à la Basilique Notre-Dame de Montréal. Je faisais partie de ce choeur professionnel depuis quelques années.

Le concert terminé, nous nous dirigeons vers la sortie de l’église et voilà Claude Gingras qui s’approche de moi et m’interpelle. Il connaît mon nom?! Il a dû voir dans le programme… Je ne l’avais pourtant jamais rencontré. Mais encore. Que ce nom lui rappelle quelque chose, dix ans plus tard?!

En m’abordant, il me dit se rappeler de mon disque BESTIAIRE (Sne-565) dont il aurait fait la critique. Ah oui?! — j’avais payé 1 500 $ une relationniste pour faire le suivi du lancement en 1990, chose qu’elle n’a jamais fait! J’ai donc moi-même investigué à ce moment-là, sans rien trouver, lui ai-je répondu. Il m’a affirmé que si.

Connaissant sa réputation, je n’ai pas pris le risque de lui demander ce qu’il en avait alors pensé…
On connaît nos faiblesses et nos forces : au moment de l’enregistrement, le producteur-réalisateur (Gilles Poirier) m’avait témoigné lui faire penser à Maureen Forrester dans l’esprit de mes interprétations. Fichu de beau compliment! Aura-t-il jugé mieux?

Je suis parfaitement fière de cet album d’oeuvres inédites, lequel fut au centre d’une 4e version de récitals sur le thème des animaux — work in progress qui dura 15 ans!! (je n’ai jamais eu peur du travail) — intitulé La Belle… et les bêtes, un zoopéra. Une oeuvre théâtralisée basée uniquement sur des mélodies françaises.

J’avoue avoir négligé de fouiller dans les archives de La Presse. Il n’est jamais trop tard.

À suivre…

Reposez en paix, Monsieur Gingras, et Merci!

BESTIAIRE (Sne-565)

BESTIAIRE (Sne-565)

Affiche_Christine-Lemelin_La-Belle&les-bêtes

Condensé de la présentation visuelle du spectacle